Matin d'hiver
Pas un cri, un murmure ou un souffle. Les images défilent, muettes. C’est à peine si le bruit sourd du roulement des boggies me parvient aux oreilles. D’imperceptibles secousses agitent mon corps à intervalles réguliers, trahissant le mouvement.
Au dehors, l’aube glacée à la lumière incertaine nous livre une brume dévorante. Des paquets de ouate se décollent avec peine du sol et tentent vainement de s’accrocher à tout ce qui n’est pas encore totalement recouvert. Le blanc manteau neigeux s’étale à perte de vue et se salit des estafilades grisâtres du corps des arbres rescapés, sursitaires résignés à l’étouffement programmé.
Au milieu de cette vision apaisée de lendemain de fin du Monde, un étang s’étale tel un joyau sombre posé sur une hermine. Son corps, grande tache gris anthracite aux contours bien nets, se livre sans retenue au regard des voyageurs. Ce qui doit être son miroir est si foncé et mat, qu’aucun reflet ne parvient à s’y accrocher. Vison rare d’une atmosphère flottant dans l’irréel. Ailleurs, tout alentour, ne règne que le blanc. Un blanc sans partage. Je suis muet devant tant de majesté et les mots me manquent. Sans aucun doute, les six que possèdent les Inuits pour distinguer les différentes nuances de blanc.
Le train se faufile doucement, continuant son chemin...
06/12/10 - ©dh
Commentaires
C'est beau...et de saison :-)
Et c'est tout récent, lors de la traversée de la Lorraine en allant à Paris. :-)
" il me manque les mots " ? On ne dirait pas ! Superbe description. Tu viens souvent à Paris ? ... Si tu es passé par la Porte de la Chapelle, je n'étais pas loin.
Merci Simone.
Il m'arrive d'aller à Paris tous les tremblements de terre. Ce coup-ci j'étais du côté de la porte d'Italie dans le cadre d'une formation. C'était quelques jours avant la grande nuit blanche et dantesque subie par les Franciliens. :-)
Et bien dis donc, tu l'as échappé belle !
On vient de se couvrir de ridicule, une fois de plus ...
Il est vrai que l'on commence à en avoir l'habitude en cette ère sarkozienne.
salut Daniel,
les voyages sont propices à la méditation...en tous cas le paysage devait être magnifique...beau à couper le souffle...mais pas l'écriture ! Toujours aussi suggestif : les paquets de ouate, les arbres rescapés, l'étang qui s'étale...
çà me plaît !
Content que cela te plaise.